Dé/cloisonner
Une exposition des membres du centre d'artistes Caravansérail (Rimouski), commissariée par Geneviève Thibault et Emmanuel Guy
Artistes participants : Jean-Marie Benoît, Josée Desjardins, Élise Dubé, Guillaume Dufour Morin, Isabelle Falardeau, Karine Locatelli, Geneviève Marois-Lefebvre, Marie-Sophie Picard, Olivier Roberge, Bruno Santerre et Léonie Therrien-Tremblay
Les cloisons nous semblent intrinsèquement paradoxales. Spontanément, décloisonner apparaît comme une action nécessaire à tout progrès. Il faut faire tomber les catégories trop rigides, depuis trop longtemps, pour libérer la force du changement. Néanmoins, les cloisons nous protègent, on s’y réfère pour définir le monde et créer du sens. Face à l’incertitude, plusieurs exigent de les consolider. La dernière année nous a offert de multiples occasions de questionner les frontières et les limites de toutes sortes. Les directives imposées changeant du jour au lendemain exposent les différences subtiles – voire ténues – qui nous permettent de classer les idées et les choses dans une catégorie ou dans une autre. Nous concevons ainsi le dé/cloisonnement comme un système cyclique.
En répondant à l’invitation de Caravansérail de commissarier une exposition collective, nous avons d’abord souhaité ouvrir un espace de création et d’échange dans un contexte particulier de confinement, de déconfinement et de reconfinement partiel. La nuance a son importance : pour nous, artistes, il ne s’agissait pas tant d’assembler une réflexion sur une thématique sociale ou artistique particulière, mais d’offrir l’opportunité aux membres du Centre de partager leur processus créatif.
La diversité des œuvres proposées reflète la nature polysémique de la thématique, nous posant d’emblée des défis quant à la conceptualisation de l’exposition et la juxtaposition des œuvres. Notre sélection résulte de nombreux allers-retours entre le réflexif et le sensible, entre un souci de représentation des techniques ou des approches et la construction d’un discours plus personnel. Dès cette étape, des dialogues s’amorcent entre les œuvres : nous y découvrons autant de points communs que de différences affirmées. Nous constatons que de nombreux artistes revisitent leur pratique durant le confinement, suggérant l’idée que le cloisonnement du corps dans l’habité amène le décloisonnement de l’habitacle corporel et l’expression de nouvelles voix
La moitié des 11 artistes de l’exposition pratiquent au Bas-Saint-Laurent, tandis que les autres participants habitent entre Gaspé et Montréal, reflétant la provenance des membres de Caravansérail tout en augmentant l’effet du rayonnement dans un contexte où les déplacements interrégionaux ne sont pas recommandés, parfois même interdits. Avec le recul, nous reconnaissons, parmi les œuvres sélectionnées, plusieurs des thèmes phares de nos pratiques artistiques respectives, comme le passage de l’espace public vers l’espace privé dans l’habité ou encore les processus de transformation et l’omniprésence du bois.
La mise en espace retenue suggère une trajectoire allant de l’extérieur vers l’intérieur, une progression du paysage naturel vers le territoire intime. Le corps est amené à traverser ces différents lieux tous investis par un questionnement ontologique, identitaire, politique ou sociétal. Chacune des œuvres souligne de manière très personnelle tantôt l’élan ou le repli, tantôt la brèche ou l’opacité. S’il se laisse porter par le courant suggéré, le corps est balloté par le ressac, entraîné par des mouvements successifs de forces opposées. Le parcours n’est pas balisé. Il n’y a pas de cartels ou d’autres indications qui encadrent et hermétisent la lecture des œuvres, laissant libre cours à une réception plus sensible des onze univers poétiques et esthétiques proposés. (Geneviève et Emmanuel)
Pour de plus amples informations (biographie et démarche des artistes, description des oeuvres, etc.), visitez le site Web de Caravansérail.
